Introduction
Les droits fonciers sont des droits sur la terre, le territoire et les ressources naturelles. Bref, c’est le droit sur l’espace-ressource. La gouvernance territoriale décentralisée, quant-à elle, est un mode de gouvernance où les pouvoirs spécifiques sont transférés aux autorités locales (Régions, communes et Chefferies traditionnelles). Au Cameroun, les droits fonciers sont-ils reconnus dans la gouvernance territoriale décentralisée ? Il convient de préciser que même si les droits fonciers sont parfois reconnus dans la gouvernance territoriale décentralisée (I), il n’en demeure pas moins qu’ils soient limités dans certaines hypothèses (II).
I- Les droits fonciers reconnus dans la gouvernance territoriale décentralisée
Les droits fonciers sont reconnus dans le processus de la décentralisation territoriale au Cameroun. Il découle de la loi n°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972, modifiée et complétée par la loi n°2008/001 du 14 avril 2008 (article 57 alinéa 3) et de la loi n°2019/024 du 24 décembre 2019 portant code général des collectivités territoriales (article 307 alinéa 2), que le Président du conseil régional est une personnalité autochtone de la Région. Ainsi, l’autochtonie, ayant pour principal corollaire la terre, conditionne la qualité des présidents Régionaux au Cameroun. C’est une reconnaissance indirecte des droits fonciers des autochtones pris sous l’angle des textes précités.
Dans le cadre des chefferies traditionnelles, la chefferie d’un village autochtone a déjà été reconnue au Cameroun en 2021. Il s’agit du village ASSOK où Sa Majesté Martin ABILA a été installé comme chef traditionnel par les autorités administratives. Il s’agit aussi d’une reconnaissance indirecte des droits fonciers [des peuples autochtones]. Les droits fonciers sont aussi reconnus dans les gouvernances forestière et minière au Cameroun. Ici, le droit à la participation au processus de prise de décision contribue à la reconnaissance des droits fonciers des communautés locales et autochtones. En matière forestière, les forêts communautaires sont des lieux où les communautés locales et autochtones ont des droits fonciers reconnus. Ils y participent pleinement à la gouvernance de ces territoires, même si cette participation est encore primitive.
II- Les insuffisances constatées
La reconnaissance des droits fonciers est parfois limitée dans la gouvernance territoriale décentralisée au Cameroun.
Premièrement, la condition de l’autochtonie imposée pour devenir Président du conseil régional contribue à la marginalisation d’une partie des populations. Le terme « autochtone » employé par le constituant et le législateur contribue à la marginalisation des véritables peuples autochtones du Cameroun. Dans le processus de décentralisation, les droits des véritables peuples autochtones (Baka, Bakola, Bagyéli, Bedzan et Bororos) ne sont pas très respectés. Leurs droits fonciers n’en sont donc pas pleinement reconnus. Bien plus, un seul village autochtone a été reconnu au Cameroun jusqu’en 2021. Qu’en est-il des autres? Dans cette hypothèse, les droits fonciers des véritables peuples autochtones du Cameroun ne sont pas pleinement reconnus dans la gouvernance du territoire.
Conclusion
En définitive, les droits fonciers et la gouvernance territoriale décentralisée ont un certain lien. Même si ce lien présente un caractère de complémentarité au Cameroun, il n’en demeure pas moins que dans certaines hypothèses, les droits fonciers ne sont pas pleinement reconnus dans le processus de gouvernance territoriale. La reconnaissance des villages et chefferies traditionnelles des véritables peuples autochtones du Cameroun (Baka, Bakola, Bagyéli, Bedzan et Bororos) et leur participation effective au processus de gouvernance pourraient permettre de combler quelques lacunes majeures.