Children begging for alms

La passion de la mendicité pousse du poil de la bête

Introduction

Beaucoup de saintes écritures recommandent dans leurs lignes, de faire l’aumône et de venir en aide aux nécessiteux. Il est même un principe moral de tendre la main à ceux qui sont dans le besoin. Tout cela est bien pour alléger ou soutenir sa conscience, sauf que la pratique a créé des dépendants qui ont fait du principe un métier qui par de beaux jours est rentable. Il est simple d’exercer le métier. Cela commence par porter des haillons, jouer en misant sur son handicap, savoir attirer la pitié et la sympathie des passants ou mieux encore, utiliser les enfants pour faire recette. On appelle cela la mendicité. Pour la passion du métier et pour la bourse, il suffit d’avoir un bon emplacement, aucune fierté et la journée est gagnée. Vive la mendicité. Est-ce que cela ne dérange personne ?

Développement

L’aurore cède à peine sa place au jour nouveau que, sans voir les rayons de soleil, on peut observer, des hommes assis le long des trottoirs de certaines artères de la ville de Lomé. Tout aussi consciencieux que peuvent l’être des travailleurs, ils prennent tôt le service à leurs postes pour assurer la pitance quotidienne. Ils attendent leurs clients ou du moins les passants. Des valeureux bienfaiteurs qui ont la main sur le cœur et des sous à dépenser. Sur leurs nattes ou tapis de fortune, ils formulent des prières au souverain Maître des cieux afin que la journée soit gracieuse. Sur leurs visages, on ne peut lire aucune gêne comme si cela était normal. Cela l’est d’une certaine manière puisqu’ils peuvent se targuer d’exercer un métier, ou plutôt une profession. Celle de mendier.  A part la pluie qui peut venir contrarier leurs plans, rien d’autre ne le peut. Ils ont des parades contre le soleil, qui à en croire les épargnes des coups de chauffes. Avec un parapluie ou, prostrés sous des parasols, ils sont à l’abri de tout excès du divin astre.  On peut considérer cette catégorie de mendiants comme les « Immobiles » puisque dans l’exercice du métier, il faut une diversité on trouve aussi les « Mobiles » et les « Experts ».

L’Art de la Mendicité

Il ne faut surtout pas croire qu’il n’y a pas la promotion du genre et la valorisation de la gent féminine dans cette profession. Autrefois chasse gardée des hommes, la mendicité a récemment recruté du personnel féminin et c’est tout bonnement que les praticiennes tiennent la dragée haute. On les trouve aussi bien dans toutes les catégories. Elles se font accompagnées par des enfants qui eux sont chargés d’aller vers les passants. L’image d’un enfant tendant la main pour chercher de la pitié est plus attendrissante et chagrinante que celles des adultes, les enfants sont la seconde arme qu’utilisent beaucoup de mendiants. La première arme est celle de savoir se présenter. Pour cela, il faut savoir faire usage de ses attributs. L’handicap est le facteur le plus mis en valeur. Ainsi, être aveugle où avoir une défaillance de motricité est un atout ou plutôt, une excuse pour se pointer à des carrefours pour tendre la main.  Un adage dit que « l’habit ne fait pas le moine mais c’est à l’habit qu’on reconnait le moine ». Alors rien n’est laissé au hasard. Il faut porter des guenilles ou des haillons pour assumer son statut de mendiant. C’est là qu’excellent ceux jouant dans les catégories de « Mobiles» et c’est là aussi que les enfants entrent en jeu. Outre rester aux côtés de leurs parents, tuteurs ou responsables, aux feux rouges et différents points de travail, les enfants sont chargés de guider ceux qui ont des problèmes de vue pour arpenter les marchés à la quête du généreux donateurs. Une attitude que déplore M. Soumaïla B. Lui, dit, détester le fait que les gens utilisent la naïveté des enfants pour les amener à mendier dans les rues et dans les marchés. Ces enfants, selon lui, doivent aller à l’école ou au pire être mis en apprentissage. Au Togo, le gouvernement a instauré une gratuité des frais d’écolage pour permettre aux enfants d’être scolarisés. C’est dommage que des gens ne veulent pas travailler et conduisent les enfants à rater le coche de la vie. alors je ne donne jamais quand ces genres de personnes se présentent à moi, a-t-il rétorqué.

Pour Issifou, il faudrait que les gens arrêtent d’utiliser l’islam pour se cacher dans la mendicité. L’Islam explique t-il, ne dit pas à ses fidèles d’aller mendier au lieu de travailler. Et si quelqu’un vient vers lui pour mendier, il lui demande de venir faire un travail pour lui donner de l’argent en retour. Les gens, selon lui, profitent seulement pour devenir expert en l’art de mendier. 

L’arnaque à portée de main

Évidemment, des experts, on en trouve partout et la mendicité n’en est pas épargnée. « Nous appelons Experts, ceux qui bien portant, accroche des gens dans la rue pour leur raconter des histoires abracadabrantes afin de leur soutirer de l’argent ». C’est ce qu’ont révélé des femmes revendeuses au Grand Marché.  Emilie, une revendeuse de vêtements de bébés a raconté qu ‘ elles se font souvent accoster par des gens qui vont jouer de la pitié et  dire qu’ils n’ont pas mangé depuis trois jours et de leur venir en aide en leur donnant quelque chose. D’autres  disent qu’ils sont portefaix au marché et que leurs employeurs ne les ont pas payés, certains se promènent avec des ordonnances mais tout cela est faux. Par exemple, elle a fait savoir qu’ une fille était venue jouer la sourde au marché et a récolté de l’argent chez les gens. Le soir, c’est chez une vendeuse de Khôm (pâte de maïs fermenté), qu’elle a été revue en train de lutter contre les gros poissons avec d’autres clients. Quand une dame l’a reconnue comme la sourde du matin, elle a nié les faits et s’est enfuie. Depuis elle ne vient plus dans les parages ». 

Sa consœur, Essévinô, a relaté sa mésaventure avec un monsieur qui l’approcha un soir à la descente du marché. l’infortuné l’aurait supplié en arguant d’être juste relâché de prison et qu’il n’avait rien pour rentrer chez lui à Adétikopé. Essévinô n’a pas pu s’empêcher d’être prise de pitié, et lui a remis mille francs (1000 fr). Trois jours après, elle dit avoir croisé le personnage avec la même petite sacoche qu’il tenait la fois d’avant et cette fois-ci, c’est une ordonnance qu’il lui a présenté. Elle s’était sentie choqué et je lui a demandé, Donc ce n’est plus de prison que tu es sorti aujourd’hui ? Le monsieur a pris ses clics et ses clacs et a juste continué son chemin. 

L’histoire est toute autre chez Bella, revendeuse de sacs de femmes, elle a étalé, son vécu avec un amputé qui fait sa quête dans les parages du Quartier administratif et qui a l’habitude de prendre poste devant la caisse de la Direction Générale de la Compagnie Energie Electrique du Togo.  Elle a raconté s’être retrouvée à la pause pour manger du Fufu (pâte d’ignames pilé) non loin de la préfecture. Quand le monsieur est venu et qu’il a fait sa commande, même les fonctionnaires de l’Office Togoliase des Recettes ne mangent pas comme ça. On est tous restés la bouche béante, quand il a fait la monnaie à deux personnes devant nous. Depuis je ne me perds plus à prendre pitié pour ceux qui mendient.   

Le léger malaise engendré

Si beaucoup s’accordent à dire que chacun fait ce qu’il veut de sa vie et gagne son pain, d’autres s’interrogent sur le laisser aller quant aux points occupés par les mendiants. Selon Cynthia, ce qui la dérénge c’est de voir un tel phénomène être toléré aux tricolores, comme celui en face du ministère des Affaires Étrangères. On peut comprendre dit-elle, qu’on puisse laisser aller la pratique dans les alentours des mosquées comme c’est le cas à Agoè-Zongo ou derrière la BTCI. Car c’est devenu un point de repère ou les gens disent qu’ils vont pour faire des sacrifices. Mais accepter que, aveugles et handicapés fassent la manche aux portes du ministère des Affaires Etrangères n’est pas décent. L’image n’est pas reluisante pour la diplomatie de notre pays.

L’avis est partagé par Albert D. un riverain du quartier Agbalépédo, qui fustige le même fait au Carrefour GTA-Agoè-Agbalépédo. Est-ce que cela ne dérange personne s’insurge t-il, que juste en face de l’allée menant à la Présidence, on puisse voir des femmes mendier avec des enfants. Ce n’est pas bien ni pour l’image du pays, ni pour le discours sur la politique sociale et surtout pas avec les efforts déployés par le Chef de l’Etat son Excellence Faure Gnassingbé. On doit remédier à cela. 

 

Conclusion

Invitation aux leaders d’opinions

De plus en plus d’initiatives sont entreprises pour amener les populations à se créer des activités génératrices de revenus, pour pouvoir se prendre en charge, eux et leurs proches. Loin de dire  que tendre la main ou demander de l’aide est déshumanisant, il serait fort utile d’amener les uns et les autres à se départir de la bassesse d’exercer le métier de mendiant. Les leaders d’opinions sont pour se faire inviter à mener cette bataille qui au-delà de favoriser l’émancipation de nombre de personnes, permettra de redonner de la valeur et de l’intégrité aux pratiquants, tout comme cela assainira nos cités. En attendant que des voix s’élèvent pour réguler le phénomène, la mendicité a encore de beaux jours devant lui, au point de se professionnaliser. Qui sait, la gêne n’étant pas visible les sourires, peut-être verra t’on bientôt l’Association des Mendiants du Togo, portée sur les fonts baptismaux.

Mawuto Clairbonheur Adjignon

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