Koloina Andriamanantsoa est une réalisatrice malgache dont le travail a été présenté au Festival de Cannes. Elle s’est entretenue avec Right for Education pour parler de son travail et de son dernier film, ConfidentiElles.
R:Ed: Est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu de vous?
Alors en fait, initialement, je n’ai aucune formation dans la cinématographie. J’ai fait des études de psychologie, de marketing et de communication et dans le but de travailler dans la pub et j’ai travaillé dans la pub pendant quelques années. J’ai pu expérimenter la production, etc. Dans le temps, les agences et donc il y a eu un déclic. Je me suis dit je ne peux plus travailler dans la pub. Faut que j’aille chercher quelque chose qui me passionne encore plus que ça. Et en fait, c’est grâce à des amis et des connaissances qui étaient déjà dans le milieu à Madagascar que j’ai pu commencer à faire mon film, mon tout premier set.
R:Ed: En tant que cinéaste, qu’est ce que c’est regarder et observer?
Alors pour moi, je dirais regardez déjà c’est aller au delà de ce que nous même on peut percevoir au premier abord, c’est aller dans un quelque chose de plus profond. Si on voit quelque chose au premier abord, ne pas s’arrêter à ce jugement là, il est plutôt vraiment regarder le fond de cette chose là. Pourquoi ça se passe comme ça? D’où et comment? Je pense que pour moi, c’est ça regarder.
R:Ed Quel est le sujet de votre film ConfidentiElle?
Le sujet qui m’a inspiré le film, c’est l’acceptation de soi, tout simplement l’acceptation de soi et justement, cette histoire de regards extérieurs. Parce que dans la culture malgache, le regard extérieur et le jugement extérieur sont très importants. On vit vraiment pour bien se faire voir aux yeux de la société. Donc, c’était vraiment pour, je dirais, cassé, mais en même temps de dénoncer ce genre de pratiques. Alors c’est sur l’acceptation de soi dans beaucoup de différents domaines. Parce que les femmes (qui sont les sujets du film) ont plusieurs différents problèmes, ont des problèmes dans leur vie, que ce soit la maladie, que ce soit l’image, que ce soit quelque chose à faire avec le corps quand on a un mec. Je voulais montrer la pression que subissent les femmes. Mais pas seulement les femmes malgaches.
R:Ed: Est-ce que vous croyez que les femmes deviennent, si ce n’est pas trop fort, un peu paranoïaque à cause de cette pression?
Sans forcément devoir utiliser le mot paranoïaque, je pense que oui, parce que même dans les pubs, etc. ca fait toujours appel à la femme. Tu dois être comme ci, tu dois être comme ça. Ça pourrait s’appeler jouer. Il y a tellement de jugement qui passent par le corps comme tout ce qui est réputation. Qu’est-ce qu’une femme qui couche avec plusieurs hommes? Par exemple, c’est une pute, alors qu’un homme qui couche avec plusieurs femmes est un Don Juan alors que c’est exactement le même concept. Ensuite, par rapport à la réputation, je pourrai citer un exemple qui se rattache un peu plus à ma culture. Mais après, je pense qu’il y a plein de femmes autour du monde qui le vivent. Le fait d’être divorcé, par exemple, ça passerait plus pour un homme que pour une femme.
R:Ed: L’image est certainement importante pour ce sujet mais est-ce que vous croyez qu’il aurait été possible de faire ConfidentiElle dans un autre médium?
Je pense que oui, à partir du moment où c’était les voix des personnes elles-mêmes qui sont des personnes qui ont vécu ces choses là. Je pense que oui.
R:ED: Qu’est ce que vous direz aux jeunes cinéastes au Madagascar?
Je leur dirais déjà de faire des films. Il n’y a pas d’industrie cinématographique là-bas, pas du tout. En fait, c’est que ça commence tout juste. Je leur dirais de faire des films, mais au lieu de mettre en valeur seulement ce qui est beau comme le paysage, la faune et la flore et tout ça, de parler justement de la culture en elle-même, de la société malgache en elle-même. Je dirais aux cinéastes malgaches de se mettre en avant de n’importe quelle manière, que ce soit des fictions ou des documentaires.