Zura Karuhimbi était une femme rwandaise qui a sauvé plus de 150 personnes au cours du génocide rwandais. Au milieu de la violence, elle était une héroïne dévouée.
Karuhimbi est née vers 1925 dans une famille de guérisseurs traditionnels hutu. Elle vivait dans le village de Musamo dans le district de Ruhango, où elle est maintenant respectée pour son héroïsme. Dans ses dernières années, sa nièce s’est occupée d’elle. Karuhimbi est décédée à la maison le 17 décembre 2018.
COMMENT A-T-ELLE SAUVÉ DES VIES?
Lors du génocide de 1994, elle a caché des réfugiés dans sa maison de deux pièces pour les protéger de la milice hutu, quelle que soit leur appartenance ethnique. Elle a sauvé des Tutsis, des Hutus modérés, des Twas, des Burundais et des Européens. Elle a même protégé des jeunes bébés. Elle cachait ces personnes sous son lit et dans un endroit secret sous son toit. Elle a également creusé un trou dans ses champs afin que plus de personnes puissent se cacher.
Karuhimbi a prétendu être une sorcière. Elle s’oindrait avec une herbe locale irritante pour la peau. En touchant les tueurs avec la substance, elle prétendit les maudire. Elle secouait également ses bracelets et agitait d’autres objets pour effrayer les hommes, affirmant que c’était le son d’esprits fâchés.
Hassan Habiyakare était l’une des nombreuses personnes qu’elle a sauvées. Il raconte: «Zura a dit à la milice Interahamwe que s’ils entraient dans le sanctuaire, ils encourraient la colère de Nyabingi [mot kinyarwanda pour« Dieu »]. Ils ont eu peur et nos vies ont été épargnées pour un autre jour. «
Les miliciens pensaient qu’il y avait des fantômes dans sa maison. Ils ont ensuite essayé de la corrompre avec de l’argent, mais Karuhimbi l’a rejetée, affirmant que «l’argent ne pourrait pas me coûter la vie à des Rwandais».
Karuhimbi n’était pas vraiment une sorcière. Elle a déclaré: «Je ne croyais qu’en un seul Dieu et le pouvoir magique n’était qu’une invention et une couverture que j’utilisais pour sauver des vies. […] Je ne suis pas une sorcière. «
Plus important encore, ses actions étaient un signe de son altruisme. Même si elle a perdu ses deux enfants alors qu’elle tentait de sauver le peuple tutsi, toutes les personnes qu’elle risquait sa vie pour protéger survivaient.
SES EFFORTS ONT-ILS ÉTÉ RECONNUS ?
En 2006, en reconnaissance de son courage et de sa bravoure, Karuhimbi a reçu la médaille de la campagne contre le génocide décernée par le président rwandais Paul Kagame. Elle était très fière de sa médaille et, selon elle, elle la prenait avec elle quand elle se couchait le soir.
En 2009, un arbre a été planté dans le jardin des Justes à Padoue, en Italie, en son honneur. Beaucoup ont également fait campagne pour la nommer au prix Nobel de la paix en 2010, mais cette tentative n’a pas abouti.
Bien que Karuhimbi soit décédée, de nombreux Rwandais se souviendront d’elle pour toujours. Son histoire a été documentée en 2014, par le journaliste rwandais Jean Pierre Bucyensenge, à l’occasion du 20e anniversaire du génocide.
Bucyensenge se souvient d’elle avec tendresse: « Elle a risqué sa vie pour sauver les autres. Et pour ce faire, elle n’a eu qu’à improviser: elle a affronté des gangs armés avec tout son corps et son intellect et elle a gagné. […] Son histoire est un rappel que l’humanité prévaut, même dans les situations les plus difficiles. «